Outil : prévention des blessures
La prévention des blessures en milieu sportif est certainement un des rôles dans lequel le kiné se sent le plus challengé.
En effet, quel club sportif, de tout niveau, ne rêve pas de n’avoir aucune blessure dans son pool de joueur?
Bien évidemment le risque zéro n’existe pas et éviter toutes les blessures dans une saison sportive et notamment en sport collectif est une utopie.
Et pourtant certaines équipes y arrivent mieux que d’autres. Les facteurs de risque sont tellement nombreux, tellement interdépendants les uns des autres et l’origine des blessures est complexe et donc toujours multifactorielle, qu’il est difficile de s’y retrouver notamment lorsque l’on veut mettre en place un plan d’action visant à prévenir les blessures du sportif.
La réalité du terrain notamment chez les amateurs, mais pas que, est encore plus éloignée de l’idéal d’une saison sans blessure. En effet la santé des joueurs n’est pas toujours la priorité, les compétences des entraîneurs et des préparateurs physiques (quand il y en a) sont plus axées sur la performance que sur la santé. L’un ne va pas sans l’autre vous me direz…
Que dire des kinésithérapeutes, qui sont rarement présents, et si ils le sont, les moyens mis en face sont bien souvent dérisoires. Un suivi d’équipe sportive 1 à 2 h par semaine tout au long de l’année relève actuellement du luxe dans le milieu du sport français.
Alors que faire quand on est kiné, 1 à 2h par semaine dans un club de sport collectif amateur pour prévenir les blessures ?
Il y a pleins de choses que l’on peut quand même proposer mais ce n’est pas l’objet de cet article.
Je voulais juste vous proposer un outil, développé en discutant avec mon pote Eliott Moreau qui s’occupe d’une équipe de rugby de Fédérale 1 à Dijon.
Vous savez que j’aime bien que les patients dessinent leurs symptômes (le bodychart de Mark Laslett) alors voici un bodychart de plus…
C’est un outil, facile à utiliser, rapide à mettre en place même sur un grand nombre de joueurs et qui donne un aperçu assez fidèle de l’état des troupes à n’importe quel moment de la saison.
Pour développer cet outil, on s’est appuyé sur deux aspects de la prévention.
Le premier concerne la prévention secondaire dont le but est de faire un tri rapide des patients/joueurs qui souffrent déjà de manière plus ou moins développée de certaines pathologies et donc à risque de s’aggraver.
Le second s’appuie sur de la prévention tertiaire à savoir éviter la récidive chez des joueurs présentant des antécédents de blessure.
L’objet de notre outil est d’identifier rapidement ces 2 populations de joueurs dont certains font partis des 2 groupes.
Je vous renvoie sur un petit article simple et efficace effectué sur des jeunes joueurs de foot il y a plus de 20ans publiée en 2005 qui met en avant l’augmentation du risque de se blesser chez des athlètes avec antécédent de blessure : Kucera KL, Marshall SW, Kirkendall DT, et al. Injury history as a risk factor for incident injury in youth soccerBritish Journal of Sports Medicine 2005 ; 39: 462.
Le fait d’avoir un antécédent de blessure est un facteur de risque important pour se blesser de nouveau. C’est également la conclusion de cette revue de littérature : Fulton J, Wright K, Kelly M, et al. Injury risk is altered by previous injury: a systematic review of the literature and presentation of causative neuromuscular factors. Int J Sports Phys Ther. 2014;9(5):583-95.
Notre outil est facile à utiliser, vous imprimez l’infographie ci-dessous en plusieurs exemplaires et on demande aux joueurs de la remplir, ils colorient en rouge les endroits où ils ont mal actuellement ou habituellement (prévention secondaire). Et ils entourent en noir les zones où ils ont déjà été blessés en ajoutant ci possible l’année (ou mois) et le diagnostic de blessure (prévention tertiaire).
Le recueil de l’ensemble de ces données permet en un coup d’œil rapide de faire un état des lieux des blessés ou futurs blessés en puissance et également de regarder en détail si il y a des pathologies communes à l’ensemble de l’équipe permettant de mieux axer les objectifs de travail sur la prévention tout au long de l’année.
En pratique ça donne ça, avec l’exemple d’un joueur présentant régulièrement des douleurs d’épaule droite, avec un antécédent de contusion musculaire de la cuisse droite en 2017 et une entorse de cheville en 2016 :
C’est, selon moi, une façon d’être un peu plus efficace dans l’heure hebdomadaire (de soins et non de prévention! ) qui est attribuée au kiné, souvent bénévole, dans les clubs sportifs.
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